jeudi 1 mai 2014

Des cellules souches embryonnaires pour traiter des crises cardiaques chez les macaques


Bizarre comme les nouvelles se télescopent. Un article du British Medical Journal (voir le commentaire de Nature publié hier) publié hier s'est penché sur l'utilisation de cellules souches adultes pour traiter les crises cardiaques. La conclusion de cette étude est que la plupart des essais sont biaisés ou que les résultats ne sont pas significatifs. Et c'est sans compter que plusieurs études semblent tout simplement frauduleuses. Il faut cependant rappeler qu'un essai à grande échelle a été lancé récemment en Europe avec le recrutement de 3000 patients, et que les résultats de cette étude sans précédent dans son ampleur ne seront connus que dans plusieurs années.

Loin de ces résultats guère encourageant, Nature publie aujourd'hui un article montrant que des cardiomyocytes (cellules du muscle cardiaque) dérivés de cellules souches embryonnaires humaines (CSEH) peuvent réparer le cœur de macaques ayant subi une crise cardiaque. Les chercheurs ont d'abord mis au point un protocole permettant de générer des milliards de cardiomyocytes à partir d'une lignée de CSEH déjà établie. Ils ont en effet calculé qu'il faudrait injecter environ un milliard de cardiomyocytes à un singe pour espérer voir un résultat positif. Ils ont ensuite provoqué une crise cardiaque "mineure" en bloquant un vaisseau sanguin cardiaque pendant 90 minutes. Puis les cardiomyocytes ont été injectés dans la zone affectée deux semaines plus tard.

Après euthanasie, les singes ont été autopsiés. Aucun ne présentait de tumeur, l'un des principaux risques de l'utilisation de cellules souches embryonnaires - cependant la courte durée de vie des macaques après la transplantation ne permet de dire si des tumeurs auraient pu se développer plus tard. Et si seulement 10% des cellules injectées ont survécues, elles ont pu se différencier, être vascularisées, et manifester une activité électrique similaire à des cardiomyocytes endogènes.

Des problèmes pas anodins
Un problème majeur est cependant apparu dans ces expérience car tous les singes traités avec ces cellules ont manifesté des arythmies, avec notamment des tachycardies à 180 battements par minute (le rythme cardiaque moyen d'un macaque est de 100 à 130 battements par minute). D'autre part rien ne permet de conclure à une amélioration de la récupération du tissu cardiaque, en l'absence d'un groupe contrôle. Enfin les auteurs soulignent eux-mêmes que la crise cardiaque induite est "mineure".

C'est donc un résultat encourageant pour le traitement des crises cardiaques, même si on est encore très loin d'une solution thérapeutique. Et bien sûr l'origine même des cardiomyocytes transplantés pose un problème éthique majeur dont les lecteurs de ce blog sont familiers. Mais rien n'empêche d'imaginer qu'on pourrait trouver une autre source, comme les cellules iPS ou les iCM (pour "induced cardiomyocytes") obtenues par reprogrammation directe évoquées dans ce billet.

Un avertissement
Cette étude sonne comme un avertissement. La thérapie cellulaire à base de cellules souches embryonnaires se rapproche et tout laisse à penser que ça marchera, au moins pour certaines pathologies. Il est donc plus urgent que jamais de trouver et favoriser des solutions éthiques permettant d'éviter le recours aux CSEH ou aux embryons humains. Mais de le faire de façon scientifiquement valide pour éviter de se retrouver dans la situation évoquée au début de ce billet...


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